Allah n’est pas obligé : focus sur le Paradoxe de la sœur Marie-Beatrice

Depuis ce premier Août,  je me suis engagé à exploiter la littérature africaine de langue française. J’ai eu l’honneur de bénéficier alors d’un don, venant d’un abonné, d’une dizaine des écrits Africains. La première oeuvre que j’ai parcourue tout le long de cette semaine, c’est Allah n’est pas obligé, de Ahmadou KOUROUMA.

Mais quelle œuvre ! Mais quelle œuvre, je te dis ! Pas étonnant qu’elle ait été primée plus d’une fois, et qu’elle soit encore d’actualité vingt ans après sa parution, et dix-sept ans après la mort de KOUROUMA

Avec une simplicité ingénieuse, se mettant dans la peau d’un enfant nègre noir africain indigène, engagé tour à tour dans le conflit Libérien et Siéra Léonais comme enfant soldat, l’auteur passe à la loupe les croyances et traditions africaines en même temps qu’il retrace, commente, raconte, éviscère, à sa manière, les deux guerres tribales qui ont agité l’Afrique de l’ouest dans les années 1990.

C’est un livre qui parle à la tête et au cœur. Il sollicite surtout nos  réflexions avec les ironies rigolotes qui essaiment  ses propos un peu partout.

 La première des ironies est de dire : Allah n’est pas obligé d’être juste dans toutes ses choses ici-bas en même temps qu’Allah ne laisse jamais vide une bouche qu’il a créée. Hein ? Explique-moi ça !  Et tous ces chefs rebelles, Comme le Prince Johnson ou le colonel Papa Le bon, qui arborent en même temps soutane, bible, coran et Kalachnikov. Oui, Kalachnikov

Et puis, il y a raconté quelque part, le paradoxe de la vie de Sœur Marie-Beatrice. Je ne sais pas pourquoi cette séquence du roman m’a autant tiqué.  Si bien que je suis allé sur Google, vérifier l’éventuelle existence de cette religieuse. Il m’a semblé que ce n’était qu’un personnage fictif du Roman, ni plus ni moins. Toute information contraire sûre et sourcée venant de toi, sera la bienvenue. 

Mais alors, pourquoi l’auteur a-t-il tenu à placer cette ironie-là ? 

Une sainte avec Cornette et Kalach

illistration

Marie-Béatrice aurait été une sœur Religieuse, mère supérieure d’un centre à Monrovia. La plus grande institution religieuse de Monrovia. Quand arriva la guerre tribale à Monrovia, la garde affectée à l’institution capitula, et … devine quoi ? La sœur Marie-Béatrice prit les choses en mains, ou plutôt un kalach en mains, et défendit alors l’institution religieuse face aux pillards. Elle mitrailla. Et mitrailla et mitrailla. Je l’imagine emmitouflée dans une soutane blanche comme neige, ou alors beige, couchée à plat ventre, fusillant, pam ! pam ! pam !

Toutes les institutions religieuses de Monrovia furent vidées par les pillards, et certains prêtres assassinés. Ne tenait plus débout que celle de la sœur Marie-Béatrice.

Mais c’est resté une sœur religieuse quand même 

Oui, parce qu’on croirait qu’elle n’avait pris le Kalach, et bradé la cornette rien que pour sauver sa petite personne, que nenni !

Durant les quatre mois qu’aurait résisté, miraculeusement et grâce au Kalach le centre de la sœur Marie-Béatrice, elle a hébergé, entretenu et nourri des centaines des miséreux, pauvres gens, et malades de Monrovia, sans parler des autres sœurs sous sa garde. 


«   … Tout le monde s’est étonné et tout le monde a soutenu  que Marie-Beatrice  était une  véritable sainte d’avoir nourri tant des gens pendant quatre mois. Allons, n’entrons pas dans les polémiques, disons comme tout le monde la sainte Marie-Béatrice.  Une vraie sainte ! Une sainte avec Cornette et Kalach ! »

Et c’est fini tout aussi …

Tout aussi extraordinairement, devrais-je dire.

Lorsque Prince Johnson, dépaysé, serait revenu à Monrovia avec sa suite écœurant d’enfant soldats, il n’aurait trouvé rien d’autre d’alléchant dans la ville, après le pillage, que la seule institution de la sainte Marie-Béatrice.

Et bien, il aurait voulu mettre main basse sur l’institution, et tout ce que son esprit a imaginé qu’elle renfermait.

Face au rejet catégorique de la sainte, de coopérer avec Prince Johnson, la force s’engagea.

«  Nous étions forts parce que nous croyions à nos fétiches. Nous avons pris d’assaut  l’institution  à trois heures du matin par claire lune. Oh !  Il n’y a pas eu de surprise ; La sainte était informée. Nous avons eu une vive résistance. Trois assaillants furent fauchés et les autres de se coucher à terre et de reculer. Tellement, tellement  la mitraille qui sortait de l’institution était bien nourrie. C’était la mère elle-même, la sainte elle-même avec tout et tout qui était à la mitraille. »

 Au total, ce fut par trois fois que la mère supérieure et sainte, Marie-Béatrice, aurait ténu tête aux troupes de Prince Johnson. Elle-même avec tout et tout qui était à la mitraille. 


Enfin des comptes, ils se passèrent le mot, sans violence, et purent vivre en paix.

Mais, dis-moi toi, pourquoi cette allusion à l’héroïsme ironique d’une sœur religieuse, à moins que c’eut été une histoire vraie qu’il ne fallait aucunement omettre ; Pourquoi ? 

Pour mettre la femme et ses capacités immanentes en exergue, peut-être ? 

Dis-moi toi, ce que tu penses de tout ça,  en commentaire. 

Peniel K.

Commentaires

Articles les plus consultés